Libérer l'industrie
Article paru dans Sociétal n°78 4e trimestre 2012
La désindustrialisation se mesure par la baisse de l’emploi industriel. Elle est systématique en France depuis trente cinq ans. Progressive quand tout va bien, elle se fait massive en cas de crise. L’industrie française vient de recevoir un nouveau choc qui rappelle celui des années 75-80. Il lui faut restaurer sa compétitivité et sa rentabilité. Au delà, pour que la désindustrialisation ne continue pas, il faudrait une modernisation profonde du système économico-social. C’est un frein pour toutes les activités, mais il étouffe l’industrie dans sa compétition avec le reste du monde.
Désindustrialisation
A la fin de 2008, la production industrielle française a subi une contraction brutale de près de 20 %. Deux ans plus tard l’indice, après un sursaut, dérape à nouveau.
Il y a là beaucoup plus qu’une péripétie conjoncturelle (celle de 1993 avait été gommée rapidement). Une chute de cette ampleur et de cette longueur a en effet beaucoup d’irréversible : équipements, marchés, personnels, tout est bouleversé.
Le décrochage actuel est à situer dans le grand phénomène de désindustrialisation que connaît la France depuis 1974. Alors que l’emploi général a augmenté de 21 %, les industries manufacturières Le terme est pris au sens large, l’agro-alimentaire est compris. ont réduit leurs effectifs de 46 %. Elles ont perdu 2.5 millions d’employés. Leur place dans l’ensemble est passée de 24 à 11 %. Le mouvement a profité aux services, qu’ils soient privés ou publics.
Tableau 1 - Emplois
Millions de personnes |
France |
Industries manufacturières |
1949 |
19.7 |
4.6 |
1974 |
22.3 |
5.4 |
2012 (*) |
26.9 |
2.9 |
(*) premier trimestre
De 1974 à 2012, la croissance de la valeur ajoutée de ces industries a été de 1.1 % / an, contre 1.9 % pour l’ensemble national. La durée du travail y a diminué de 17 %. Compte tenu de la régression des effectifs, les heures travaillées ont été réduites de 55 %. En corollaire, la productivité a progressé de 3.2 % / an. Tel a été le prix payé, pour rester compétitives, par ces activités exposées à la concurrence, qu’elle soit européenne ou mondiale. Le coût salarial a suivi en moyenne la productivité. L’évolution sur ces quarante années a été loin d’être régulière; des périodes bien typées se sont succédées. Nous allons les analyser en les comparant aux années de forte croissance qui avaient précédé.
Tableau 2 - Taux de croissance – Industries manufacturières
% / an |
1949 -1974 |
1974 - 1985 |
1985 - 2007 |
2007 - 2012 |
Valeur ajoutée |
5.9 |
1.1 |
1.8 |
-1.8 |
Heures travaillées |
0.2 |
-2.8 |
-1.7 |
-2.6 |
Productivité horaire |
5.7 |
3.9 |
3.5 |
0.8 |
Coût salarial horaire |
6.6 |
3.9 |
3.4 |
3.1 |